- Aasunan ?
- Bonjour Patience Lemerle. Vous savez que vous êtes partie bien vite ?
Un chapitre pour convaincre
- Que faites-vous ici ?
- Comme je vous l'ai dit. Vous êtes partie très vite. Même trop vite.
La sorcière reporta son attention sur le cours. Elle venait de comprendre ce que voulait le chef de l'Honai et il n'en était pas question. Elle ne voulait plus rien avoir à faire avec le Sekutsa, même si elle en était originaire et même si elle était plutôt choquée et intriguée d'apprendre qu'Aasunan était en réalité une femme.
Patience passa son temps à éviter Heiki. Lors des récréations elle se servait de Jessie pour empêcher la jeune femme d'approcher, cette dernière étant trop raisonnable pour parler de l'autre monde devant le jeune garçon. En cours la française se plaçait près de la sortie, ce qui intriguait certains de ses camarades de classes en raison du fait qu'elle ne le faisait pas avant, afin de se précipiter dehors dès que cela sonnait.
La widouka n'avait pu lui parler qu'à la pause déjeuner, alors que la sorcière s'installait à la cafétéria de la cantine avec son plateau. Celle-ci était composée de trois rangées de tables qui s'étendait dans toute la salle, qui s'étendait sur plusieurs mètres. Heiki s'était installée devant Patience, la regardant fixement manger ses
frites. Cette dernière était très embarrassée de se sentir ainsi observer. Finalement, elle posa violemment sa fourchette à côté de son assiette avant de lâcher :
- Je n'aime pas que l'on me regarde bouffer, madame.
Cette remarque vexa clairement la jeune femme malgré le fait qu'elle tentait de le
cacher. La sorcière en était ravie et recommença à s'occuper des ses frites. Un de ses camarades de classe passa près d'elles avec son plateau sans faire attention à elles. Quand il fut assez loin pour ne pas l'entendre, Heiki tenta :
- Pourquoi êtes-vous partie ?
Patience garda le silence. Elle refusait catégoriquement de se justifier. Surtout
devant la personne qui passait son temps à monopoliser Clément, l'éloignant plus d'elle. Car elle était à présent certaine que c'était pour cette raison qu'il ne voulait plus d'elle. Cependant, cela ne sembla pas déstabiliser le chef de l'Honai, qui demanda brusquement :
- Puis-je voir ce mot ?
La sorcière sursauta, ne s'y attendant pas. Un autre élève passa à côté d'elles avant que Patience ne se lève brusquement avec son plateau, absolument furieuse qu'Heiki veuille se mêler de ce qui ne la regardait aucunement.
Elle alla poser son plateau avant de sortir en trombe sous le regard d'Aasunan. Elle
se dirigea avec hâte au CDI, seul endroit où elle se savait tranquille. Elle passait entre les élèves, slalomant pour n'en renverser aucun. Brusquement, elle crut voir le visage d'Eylan. Elle s'arrêta et se tourna vers ce dernier, qui fut en réalité celui
d'un élève normal. Légèrement déçue, elle reprit sa course.
Patience ralentit et pénétra dans le sanctuaire qu'était le centre de documentation
et d'information. La documentaliste était derrière son bureau, placé droit devant. Celle-ci releva la tête vers la nouvelle arrivante en lui souriant. Sourire que lui rendit la sorcière, qui s'approcha de la femme trentenaire avant de la saluer :
- Bonjour madame.
- Bonjour. Tu as passé de bonnes vacances ?
- Disons plutôt qu'elles ont été éreintantes. J'ai eu un petit ami mais je me suis
rendu compte qu'il jouait avec moi.
- Oh vraiment ? compatit la documentaliste. Comment tu l'as découvert ?
- On m'a fait parvenir un mot comme quoi il ne m'aimait pas et après réflexion je me suis rendu compte que c'était vrai. Même s'il me disait toujours qu'il m'aimait.
- Ah bon ? fit-elle, surprise. Mais est-ce vraiment la vérité ? As-tu essayé
de lui en parler ?
Ces paroles intriguèrent Patience, qui ne sut quoi répondre. La trentenaire avait raison en un sens mais pourtant il ne fallait pas oublier qu'Eylan n'était pas n'importe qui. C'était un vampire qui n'arrêtait pas de l'embêter au début. Elle baissa la tête
tristement, ne sachant comment réagir. De toute manière il était à présent trop tard : ils n'étaient plus dans le même monde.
Afin de se changer les idées, la sorcière alla voir les livres sur sa gauche. Il y en avait de toutes sortes sur les grandes et hautes étagères. Elle les parcourut du regard, ne sachant quoi choisir. Brusquement, elle s'arrêta sur un ouvrage qui l'intrigua. Patience était bizarrement attirée par lui, comme par une connexion mystique. Ce genre d'évènement ne lui était arrivé qu'une seule fois, quand elle avait vu Antigone. Elle prit le livre dans sa main et le sortit de l'étagère avant de le reposer en s'apercevant qu'il était sur les vampires. Elle comprenait alors mieux pourquoi il l'attirait.
Elle secoua sa tête afin de se reprendre. Après tout, elle ne ferait que se faire du mal si elle continuait à penser à lui. C'était la première fois qu'elle pensait autant à un garçon. Était-ce cela qu'on appelait l'amour ? Et bien elle n'aimait pas cette sensation car elle l'empêchait de vivre tranquillement. Elle sentait le besoin de le revoir, de le toucher, de tout partager avec lui. Elle sentait que si elle le revoyait elle n'arriverait absolument pas à le rejeter. Elle retomberait instantanément dans ses bras. La sorcière commença à angoisser quand l'idée qu'Eylan ait pu suivre Heiki dans le monde réel pour la récupérer survint dans son esprit. Ce n'était pas parce qu'elle ne comptait pas réellement pour lui qu'il ne ferait pas tout pour ravoir son « jouet ». Et puis, elle devinait qu'il était furieux qu'elle ait embrassé Yan.
Les cours reprirent. La chef de l'honai était encore présente, au grand désespoir de Patience. Par chance, elles n'étaient pas côte à côte dans la classe. Mais la sorcière sentait qu'Aasunan n'abandonnerait jamais. Cela se confirma quand la châtaine au
catogan passa l'heure à observer la jeune fille.
Lorsque finalement la dernière sonnerie retentit, Patience se précipita à l'extérieur en ayant prise sa décision : elle allait demander l'avortement le soir même. Elle ne pouvait pas le garder en raison de son âge et de l'origine du père. Ce n'était pas sa race qui gênait mais le fait qu'elle l'aimait. Et cet enfant lui rappellerait beaucoup trop cet amour qu'elle avait décidé d'abandonner.
Elle se dirigea vers l'hôpital, suivie discrètement par Heiki et par une ombre noire menaçante. Le grand bâtiment blanc se dressait devant elle, devenant de plus en plus grand. Plus elle s'en approchait, plus elle avait mal au ventre, signe d'une intense angoisse. Mais elle considérait n'avoir pas le choix. Si elle le gardait, elle aurait des problèmes mentalement. Et puis, était-elle capable de s'occuper correctement d'un enfant ? Elle qui avait eu un père scientifique qui n'avait comme dessein que de l'utiliser ? Elle qui n'avait jamais eu la chance d'avoir une mère biologique ? Elle qui allait être mère sans avoir eu de véritable exemple à l'exception de celle qui l'avait adoptée ? Non, elle ne pouvait pas endosser ce rôle. Il était pour une autre personne, plus responsable.
Elle entra à l'intérieur, rejointe rapidement par le chef de l'Honai. Cette dernière avait son air sévère de commandant exaspéré par ses soldats. Elles s'approchèrent du secrétariat. L'ombre pénétra dans l'hôpital après elles avant de s'installer à part sur un fauteuil d'un coin servant à l'attente, à droite du secrétariat. Elle les observa attentivement en faisant bien attention à ce qu'elles ne le remarquent pas. Heiki insistait :
- Vous manquez à beaucoup de widoukas.
- Vous mentez, l'accusa calmement la sorcière. Personne ne m'aimait.
- C'est le mot qui vous l'a dit ?
- Oui.
- Et qui vous prouve que c'est vrai ?
Patience ne répondit rien et se contenta de demander un rendez-vous à la secrétaire avec un médecin spécialiste des avortements. La trentenaire derrière le bureau haut lui demanda de patienter un instant le temps qu'elle regarde dans le grand agenda à cuir noir s'il y en avait de disponibles. Au bout d'un moment où Heiki tentait discrètement de persuader la sorcière de revenir au Sekutsa, la secrétaire passa un appel avant de relever la tête après quelques minutes afin de l'informer qu'un médecin n'avait rien à faire en ce moment et pouvait l'accueillir dans l'immédiat. Ce que Patience accepta avec ravissement. Le chef de l'honai l'accompagna là-bas en silence, ne sachant plus tellement que dire pour la convaincre.
À suivre ! Qui est la mystérieuse ombre ? Et bien vous ne le saurez qu'au prochain chapitre. Mouhahahahahaha.
PS : La taille 12 et 13 marche pas aujourd'hui. Sauf quand j'écris directement et c'est chiant.